Pour les habitants des zones jurassiennes de France et de Suisse, l’industrie horlogère fait partie des activités artisanales et industrielles de la société depuis bien longtemps. Ainsi, dès le milieu du XIXème siècle, une véritable industrie horlogère est apparue sans que les activités artisanales disparaissent et depuis, l’horlogerie a connu des crises régulières au cours de son histoire, la dernière très importante a été celle des années 70.
En 1970, les transistors sont devenus des composants électroniques faciles à utiliser, bon marché à produire en grandes quantités et qui permettaient de créer des appareils électroniques transportables fonctionnant avec des piles ou des batteries. L’horlogerie mécanique est alors considérée comme dépassée dans tout l’arc jurassien, plus aucun investissement industriel n’est fait, dans la branche horlogère pendant près de 20 ans. Quelques rares entreprises comme Rolex, Patek Philippe, Vacheron Constantin, Oméga ou Piaget vont cependant maintenir des fabrications de montres mécaniques.
Et depuis 40 ans l’horlogerie suisse se porte bien. Elle s’épanouit dans un marché de niche de 25 milliards de CHF annuel qui se maintient très bien grâce au profond respect que les entreprises horlogères ont de leurs clients, et à leur fidélité en retour. Ensuite, la contrefaçon, quelle que soit son importance (9 montres sur 10 vendues dans le monde en sont issues) ne fait pas de concurrence aux grandes marques
En revanche, dans une perspective de développement transfrontalier dans l’Arc jurassien franco-suisse, ce qui semble important c’est de permettre à la fois d’alimenter un marché de niche très profitable, que ne remet pas en question la sous-traitance de qualité que permettent les entreprises françaises, mais surtout de profiter des développements prometteurs qu’induit l’horlogerie pour les microtechniques en Suisse comme un France.
La microtechnique (CH), les microtechniques (F), un avenir transfrontalier
Nous avons vu que l’expansion de la haute horlogerie est limitée, en revanche, depuis 40 ans, a émergé la microtechnique. Le savoir-faire en micromécanique acquis au contact de l’horlogerie s’est enrichi de connaissances en électronique, en particulier dans les domaines de la basse consommation, mais aussi de l’informatique embarquée qui lui est associée.
Or, l’industrie qui produit ces dispositifs microtechniques occupe une place non négligeable pour nos régions transfrontières. A titre d’information elle occupe en Suisse un nombre de travailleurs équivalent à ceux qui travaillent dans l’horlogerie (Près de 100’000 en 2023[1]).
Cependant, le domaine de la microtechnique ne travaille pas avec les marges de l’horlogerie de luxe, et les gains sont plus proches de ceux de l’industrie traditionnelle, sauf à privilégier des dispositifs s’apparentant à de niches.
Au final nos deux pays pêchent par une erreur de principe : Nous ne voudrions soutenir des activités que si elles ont une dimension européenne ou mondiale, que si le monde entier a envie de les adopter. Or, c’est exactement le contraire qu’il s’agit de faire : il faut cultiver les activités pour lesquelles nous avons des dispositions meilleures que les régions concurrentes. Les seuls marchés qui peuvent être profitables pour nous sont les marchés de niche, ceux pour lesquels les volumes ne sont pas trop grands, mais pour lesquels il faut sans cesse innover, trouver de nouvelles idées qui répondent aux besoins du marché. C’est ce qui doit permettre à nos économies transfrontalières de se développer.
Le Forum Transfrontalier propose d’identifier les forces en présence, de les cultiver conjointement et pour cela, de mettre en place des assises « de(s) microtechnique(s) » afin de comprendre les interactions qui lient les entreprises françaises et suisses et les besoins qui en émergent.
Jacques JACOT
[1] En 2008 : 37 000 en Franche-Comté pour 58 000 dans l’Arc jurassien suisse – Source OSTAJ, 2013.