Des compétences remises en question face au COVID
Marcel, notre secrétaire m’a demandé de faire un papier sur la formation, un sujet que j’avais sans doute évoqué lors d’une précédente réunion. Mon passé de professeur d’une école d’ingénieurs pendant près de 20 ans me donne encore le privilège d’entretenir de nombreux contacts avec des jeunes qui me sollicitent pour avoir des conseils sur la manière d’entreprendre et de développer de nouvelles activités. Ils me disent que je dois continuer d’assurer un dialogue entre plusieurs générations, que nous les anciens, nous sommes responsables de transmettre les valeurs auxquelles il faut se référer pour rendre notre société vivable. Ils ont sans doute raison, la génération dont je fais partie doit aider les jeunes à adapter la société aux conditions actuelles.
La formation professionnelle vise à donner à des jeunes adultes des compétences qui leur permettront d’exercer un métier. Acquérir des compétences est une approche très différente de celle de trouver des connaissances sur le WEB. Les compétences personnelles permettent de réaliser des objets, de mener des travaux, de fournir des services que des entreprises vont mettre ensuite sur le marché ou que l’on offrira soi-même si l’on est indépendant. Chaque jeune doit trouver une place dans la société, mais aujourd’hui leur itinéraire pour acquérir cette autonomie n’est plus balisé. Ils doivent trouver eux-mêmes leur voie. Cette liberté est lourde à assumer. Certes selon ce schéma, être manutentionnaire, servir dans un fastfood sont des travaux qui permettent de survivre, mais la valeur ajoutée pour un jeune dans un travail de ce type est bien maigre. Cela ne suffira pas à son épanouissement. Chacun doit trouver comment acquérir des compétences qui lui permettent de s’épanouir dans son travail et dans la société, de fonder une famille et d’avoir des loisirs avec des amis. Mais en cette période de Covid, les jeunes n’ont plus le moyen d’échanger entre eux leurs expériences, de saisir les opportunités qui se présentent, …, plus de nouvelles sur ce que font les amis, c’est l’isolement total.
Nous ne pourrons pas continuer notre discours sur la sécurité des personnes à risques et la saturation des urgences dans les hôpitaux, il faut nous préparer à changer notre approche et cesser notre discours sur la sécurité. Que l’on vaccine d’urgence les personnes qui risquent des complications et que, pour les autres, nous acceptions que quelques-uns n’auront pas de chance et seront durement touchés par le Covid. Nous ne pouvons pas demander aux jeunes de se couper de leur avenir dans nos sociétés.
Jacques Jacot, Fontaines, le 9 février 2021